Depuis plus de trente ans, la plupart des grandes réformes du droit du travail ont à cœur de favoriser la conclusion d’accords collectifs dans les entreprises. L’instauration de la négociation annuelle obligatoire (NAO) en 1982 a posé les fondements de cette nouvelle dynamique.
La réforme de septembre 2017 s’inscrit dans la même mouvance, notamment en apportant plus de flexibilité à ce qui est appelé maintenant la « négociation obligatoire d’entreprise ».
La loi ne fixe aucun seuil d’effectif minimum déclenchant l’obligation de négocier. Aux termes de l’article L2242-1 du code du travail, les négociations obligatoires doivent être organisées dans chaque entreprise disposant d’un délégué syndical (DS). La réforme de 2017 prévoit que les négociations pourront aussi se dérouler au sein du nouveau Conseil d’entreprise (dispositions en attente des décrets d’application).
Rappelons que la désignation d’un délégué syndical peut intervenir à partir de 50 salariés, sauf accord plus favorable. Dans le bâtiment, la majorité des entreprises ont un effectif inférieur à 50 salariés, et sont rarement pourvues d’une section syndicale représentative. Mais si les structures de plus de 50 salariés ne représentent que 0.4% de l’ensemble des sociétés du secteur, elles concentrent près de 28% de l’effectif total (source : FFB).
Imposer des négociations obligatoires dans le BTP présente donc un intérêt pour les 289 000 salariés de ces entreprises. Par ailleurs, il convient de rappeler que les employeurs ont toujours la possibilité d’instituer volontairement une négociation périodique, même en l’absence de DS.
Les négociations se déroulent en principe au niveau de l’entreprise. Elles peuvent cependant être organisées dans un établissement distinct, à la condition que celui-ci dispose d’un délégué syndical. De même, certains sujets sont aussi traités directement au niveau du groupe, dispensant l’entreprise de négocier sur ces mêmes thèmes.
La négociation obligatoire d’entreprise avait déjà fait l’objet d’un profond remaniement à l’occasion de la loi El-Khomri (loi n°2016-1088 du 8 août 2016) :
L’ordonnance du 22 septembre dernier s’inscrit dans la continuité de cet effort de flexibilisation. Les entreprises peuvent désormais structurer leurs négociations obligatoires en amont, via la signature d’un accord de méthode :
Depuis 2016, la négociation obligatoire s’articule autour de trois principaux thèmes :
L’accord de méthode ne dispense pas les entreprises de ces trois négociations. Il peut en revanche ajouter de nouveaux sujets de discussion (article L2242-1 du code du travail).
L’accord préalable permet de déterminer la fréquence à laquelle seront organisées les négociations. Au maximum, elles devront être engagées tous les quatre ans. En l’absence d’accord, l’employeur appliquera la périodicité classique imposée par le code du travail :
Afin d’anticiper au mieux le déroulement des rencontres, l’accord de méthode peut aussi comporter des dispositions concernant le calendrier des négociations, le lieu de réunion et les informations que l’employeur s’engage à fournir aux négociateurs. Il intègre également les modalités de suivi de l’accord (création d’un comité de suivi ou consultation des représentants du personnel par exemple).
L’organisation des négociations relève de la responsabilité de l’employeur. Face à son éventuelle inertie, une organisation syndicale représentative dans l’entreprise est en droit d’en solliciter l’ouverture. L’employeur dispose alors d’un délai de 15 jours pour y procéder. Il convie l’ensemble des organisations à une première réunion. Chaque représentant syndical peut venir accompagné d’un salarié de l’entreprise. En l’absence d’accord de méthode, cette rencontre est l’occasion d’organiser le déroulement de la négociation. Elle est obligatoirement suivie par au moins un autre rendez-vous. Attention, pendant la phase de négociation, l’employeur ne peut prendre aucune décision unilatérale concernant l’un des sujets encore en débat.
En principe, la négociation aboutit à la signature d’un accord. Celui-ci s’appliquera dans l’entreprise à la condition d’avoir obtenu un nombre minimal de signatures.
À partir du 1er mai 2018, le seuil de validité des accords d’entreprise passera de 30% à 50% : tous devront être signés par une ou plusieurs organisations syndicales représentatives ayant récolté au moins la moitié des suffrages lors des dernières élections professionnelles. Il arrive aussi que les négociateurs ne trouvent pas de consensus. Ils dressent alors un procès-verbal de carence. En effet, l’obligation de négocier n’implique pas une obligation de conclure.
L’accord ou le PV de carence sont ensuite déposés auprès de la Direccte, ainsi qu’au greffe du Conseil de Prud’hommes. Depuis le 1er septembre 2017, l’accord fait l’objet d’une publication dans la nouvelle base de données des conventions collectives (article L2231-5-1 du code du travail).
L’employeur qui manque à son devoir en matière de négociation obligatoire s’expose à différentes sanctions :
Assouplie par la réforme de septembre 2017, la négociation annuelle d’entreprise reste un rendez-vous important dans les entreprises concernées par cette obligation.
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